Critiques de presse longues

 L'avis de la rédaction Nord-Cinéma

Critique de André

Voilà un excellent film qui, au moins, défend et applique le thème pour lequel il a été conçu: la fraternisation. Preuve en est la fiche technique éminemment européenne qui reflète parfaitement le but recherché par le réalisateur.
De toute façon, Christian Carion, en partant de faits dramatiques et avérés, a écrit un scénario en tous points remarquable qu'il sert en images émouvantes au possible, par l'authenticité des situations auxquelles le réalisateur a préparé le spectateur avec talent, en plaçant de brèves séquences que l'action relie entr'elles jusqu'à l'installation de ces symboliques arbres de Noël et de ce qui s'en suit comme pathétiques et brefs moments de bonheur.
En plus de l'impeccable restitution des lieux et des uniformes, quelle émotion émane de ces amours, de ces souffrances, de la bêtise, au fil d'une oeuvre traitée avec infiniment de pudeur et de lucidité, sans oublier ce brin d'humour qui fait supporter l'odieux des massacres.
La musique de Philippe Rombi est superbe.
Quant à l'interprètation, elle m'a paru exemplaire de vérité et d'émotion, particulièrement de la part d'une jolie Diane Krüger, de Guillaume Canet impeccable, tout comme son homologue allemand Benno Fürmann, de Danny Boon en pittoresque bidasse ch'ti, et Bernard Le Coq dont le talent d'acteur réussit à donner un peu d'humanité à un rôle de général particulièrement stupide.

De par mon âge...certain, j'ai fort bien connu et parlé avec des Poilus survivants de Verdun ou autres carnages. Je n'ai pas souvenir de les avoir entendu exprimer des mots de haine envers leurs adversaires.
Mais envers leur commandement, hiérarchie, ces héros décorés n'avaient que mépris et ressentiment.
C'est dire si ce film m'a convaincu.

Critique de Lucie

La guerre est par définition une bêtise (désolée pour la faiblesse du terme mais je me devais de rester polie) qui oblige des personnes se ressemblant à se détester. Des personnes qui pourraient être les meilleurs amis du monde à s’entretuer sans réfléchir. Ca fait des siècles que ça existe et on a toujours pas compris le ridicule de la chose. Son absurdité. Parce qu’on a oublié qu’avant d’être des soldats ils étaient avant tout des êtres humains. Des hommes qui aimaient leur femme, qui versaient une larme quand le petit dernier se mettait à marcher pour la première fois, qui avaient tellement de belles choses à faire dans leur vie avant de mourir, mais qu’on mettait dans des tranchées pour la patrie. Pendant que les généraux restaient devant leur cheminée pour se réchauffer et se plaindre que la guerre s’éternisait.
Je ne comprends pas qu’un tel sujet soit resté caché tellement de temps au grand public alors que des conflits de la même absurdité explosent un peu partout. Combien de morts évitées, de familles décimées en moins, si on avait montré que la fraternisation était possible et que tout ça ne rimait à rien. Mais heureusement, maintenant on le sait.
Je m’enflamme comme toujours mais je ne parle pas vraiment du film. Il faut souligner et même acclamer la ténacité de toute cette équipe qui n’a jamais abandonné malgré tous les bâtons que certains leur ont mis dans les roues. Ils ont dû se débrouiller avec un budget réduit, et des tonnes d’interdictions, notamment sur le lieu du tournage. Et on voit que chaque centime de cet argent a été utilisé avec intelligence et efficacité. Les images sont fortes et la mise en scène tient parfaitement la route. La bande son est magique et participe à l’ambiance particulière qui règne sur ce film. Et je ne pourrai pas juger du scénario puisqu’il est vrai.
Quant aux acteurs, ils sont tous exceptionnels. Diane Kruger reste lumineuse même dans ces conditions extrêmes. Guillaume Canet est vraiment touchant. Dany Boon parvient à nous arracher un sourire de tendresse et on s’attache très vite à son personnage. Mais mon coup de cœur reste Steven Robertson dans le rôle de Jonathan, jeune anglais qui perd son frère lors d’un assaut et qui reste complètement prostré dans sa haine pour l’ennemi. Il a dans le regard toute la détresse du monde.
J’ai détesté les personnes que j’ai entendues rire à certains moments qui se voulaient ironiques. J’avais envie de leur dire « Vous ne comprenez rien ». Alors c’est peut-être moi qui n’arrive pas à avoir le recul nécessaire, mais tant pis. Quand l’Histoire est si stupide, je ne peux y trouver aucun humour.
Bref, « Joyeux Noel » est peut être un remède anti-guerre. Il était temps qu’il existe. Que tous ceux qui veulent comprendre le message qu’il transmet en parlent. Que les choses changent et qu’ils ouvrent enfin les yeux. C’est la veille de l’armistice. Le jour où ils ont décidé que ça suffisait et qu’il n’y aurait pas un autre réveillon dans les tranchées. Près de quatre vingt dix ans plus tard, il n’est jamais trop tard pour bien faire. « On a oublié la guerre mais elle ne nous a pas oublié »…alors évitons de la réveiller….